Chauve-souris rouge

Publié le par Yan

Dans Batman - Under The Red Hood, dernier film d'animation signé Warner Premiere, Batman n'est pas doublé par Kevin Conroy. Et c'est nul. Même le Joker n'est pas doublé par Mark Hamill, et c'est encore plus nul. Ceci dit, si les changements du doublage ne sont pas les premiers dans les films DC, ils prennent sens à la vue de l'histoire. Dans la veine d'un Superman Doomsday, Under the Red Hood est en effet une relecture d'un pan de mythologie du Caped Crusader.

 

 

 

 

Inspiré du run (de Batman #635 à 641) du même nom signé Judd Winick (qui s'occupe lui même du scénario du film), Under the Red Hood est la suite, 15 ans après, du Death in the Familly de Jim Starlin. En 1988, Starlin écrivait l'un des épisodes les plus tragiques de l'histoire de Batman et tuait Jason Todd, le deuxième Robin, des mains du Joker. Bien plus tard, reprennant la série avec Jim Lee fin 2002, Jeph Loeb écrit Hush, au vilain éponyme qui chuchotte derrière un masque de bandages et qui, jusqu'aux derniers épisodes, laissa croire qu'il n'était autre que Todd, revenu d'entre les morts. Finalement, on découvrira qu'il s'agissait de Clayface, engagé par le vrai Hush pour faire tourner Batman en bourrique. Seulement voila, l'idée avait germée dans la tête d'autres scénaristes et, après le crossover War Games, Judd Winick crée Red Hood.

Enfin, "crée", tout est relatif. Red Hood est apparu pour la première fois en 1951 dans Batman #165. A la fin de l'épisode, il tombait dans une cuve d'acide et devenait le Joker. Wai, le Joker.

 

De fait, vous pensez bien que le film prend un malin plaisir à jouer avec le fait qu'on connaisse l'histoire. Les allusions sont nombreuses et si elles ont la finesse du Bat-tank de Christian Bale, elles permettent au moins au spéctateur ignorant les faits de vite se retrouver dans le bain : le tout n'est pas de savoir que Red Hood est Jason Todd, mais de savoir pourquoi. On n'est ainsi pas surpris le moins du monde quand Hood, à l'issue de sa première poursuite avec Batman, l'emmène dans l'usine où son prédécesseur est devenu le Joker, le lieu du 1er échec de Batman.

 

Il y a bien évidemment un beau paquet de libertés prises par rapport au comic, pour la plupart induites par le désir de fluidifier la narration. D'autres, par contre, restent mysterieuses un long moment, comme la mort de Jason qui se passe cette fois-ci à Sarajevo. Si ce petit changement ne sert pas à grand chose dans l'absolu, il permet néanmoins aux animateurs de nous offrir une scène d'intro qui met dans le bain : la ville est en ruines, c'est sombre, Batman fonce sur sa moto en espérant arriver à temps pour sauver Robin. Robin, lui, douille sévère. Le Joker est égal à lui même et repeint le sol avec l'hémoglobine de son captif. Car oui, Under the Red Hood, est un film sanglant et sombre. Le Joker a une tête tordue (encore pire que d'habitude), Batman a une moue renfrognée du début à la fin qui lui donne de faux airs Dreddiens, et on n'hésite pas à tuer.

Puis, "5 ans plus tard", vient le Red Hood, dont l'entrée en scène fait imanquablement écho à l'arrivée du Joker dans le Dark Knight de Nolan. Présenté comme un pur méchant, avec têtes dans le sac à dos et tout le tralala, il promet de protéger un conglomérat de mafieux de Batman et du... Black Mask ?

Je ne connaissais pas ce vilain (créé dans les 80's avec la tête du Red Skull, mais noire) mais au rayon des personnages frappadingues, Black Mask est une espèce de Kingpin surexité, absolument délectable, notamment pour l'alchimie créée avec son assistante, froide et imperturbable.

 

Ma transition est toute trouvée, car animateurs et scenaristes ont vraiment fait un excellent travail au niveau de la caractérisation des personnages. La premières scène de baston du film, présentant Batman et Nightwing face à Amazo, en est un parfait exemple. Non seulement l'animation est magistrale, mais narration et dialogues font que les deux personnages fonctionnent vraiment comme un seul. Au point que Batman refuse l'aide de Nightwing et lui pose des lapins tout au long du film. Classique, certes, mais fort bien mis en scène.

Il est inutile de vous dire que le Joker sera bien évidemment de la partie, rappellant d'ailleurs beaucoup la version Heath Ledger du clown sadique qui fait rire mais qui fait peur. Violent et tordu, au même titre que Todd, transformé en vengeur binaire : t'es méchant, j'te tue.

 

L'animation ? Ah. Ben. En un mot : Warner. Comme toujours, c'est fluide et expressif, sans fausse note malgré les nombreuses poursuites et les innombrables combats. On pourra peut-être faire la moue sur le character design, surprenant, mais le reste est au poil, dans un style rappelant, forcement, le dernier film de Nolan. Les voix sont elles aussi excellentes, et comme pour Superman Doomsday ou JLA Crisis on Two Earths, la Warner a fait appel à des acteurs bankable en plus des doubleurs confirmés.

 

Au diapason de la gamme plus adulte des derniers films DC, Under the Red Hood est sombre, violent, dérangeant, et n'en reste pas moins un Batman pûr jus, avec des doutes et des bourres pifs, et un Joker toujours aussi exhaltant, même quand il n'est pas doublé par Mark Hamill. t

Publié dans Cinémascope

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